Magistrat, magistrate administratif
Investis d’une fonction sociale essentielle, les magistrats administratifs exercent un métier diversifié et acquièrent des compétences valorisées. Aussi bien au sein du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel qu’en dehors, leurs compétences leur offrent des perspectives de carrière enrichissantes et complètes. Leur statut est reconnu et leur rémunération a été revalorisée très récemment à l’occasion de la réforme de l’encadrement supérieur de l’État, qui a confirmé l’appartenance des magistrats administratifs à la haute fonction publique.
Une fonction essentielle, un métier diversifié, des compétences valorisées
Une fonction essentielle et reconnue
Dire le droit, protéger les libertés et les droits fondamentaux des personnes et défendre l'intérêt général : la position du juge administratif au cœur de la vie publique explique la croissance et la diversité du contentieux administratif.
Ce rôle éminent s'affirme davantage chaque année. En 2022, les tribunaux administratifs ont rendu 232 332 jugements et les cours administratives d'appel ont rendu 31 981 arrêts.
Le juge administratif dispose de pouvoirs qui se sont largement accrus ces dernières années, lui permettant désormais d'assortir ses décisions de mesures propres à en assurer l'exécution, et de statuer dans l'urgence dans le cadre de procédures de référé rénovées. Son rôle, constitutionnellement établi, est largement reconnu.
Cette responsabilité singulière, qui est celle de chaque magistrat, est consacrée par des garanties et des exigences déontologiques particulières. Le magistrat administratif bénéficie de toutes les garanties associées à la qualité de juge. Le statut du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel garantit son indépendance et notamment, son inamovibilité, depuis la loi du 6 janvier 1986. Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel se prononce sur la plupart des mesures intéressant la carrière de magistrat (mutations, promotions) : organe consultatif indépendant présidé par le Vice-président du Conseil d'État, ses avis et propositions sont systématiquement suivis par l'autorité de nomination.
A la fonction juridictionnelle s’ajoutent des fonctions administratives. Les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel peuvent être appelés à donner des avis sur les questions qui leur sont soumises par l’administration. Les magistrats administratifs, individuellement, se voient confier des missions administratives variées (présidence de commissions, jurys…).
Un métier exigeant et diversifié
Au titre de ses fonctions juridictionnelles
Le magistrat administratif est appelé à juger de tout litige qui peut naître entre l'administration et les administrés. Aux premiers stades de sa carrière, comme conseiller puis premier conseiller, il peut exercer les fonctions de rapporteur ou de rapporteur public. Il organise son activité de manière autonome dans le cadre d'objectifs clairement établis et structurés en fonction des exigences collectives de l'audience.
Cette activité, où le travail individuel s'enrichit des échanges informels entre collègues comme des délibérations formalisées en séances d'instruction ou de jugement, combine intérêt intellectuel, responsabilité personnelle et engagement collégial :
en tant que rapporteur, le magistrat administratif instruit en totalité l'affaire, rédige le projet de jugement, défend sa position au cours du délibéré et participe au vote ;
en tant que rapporteur public, il fait connaître à la juridiction, en toute indépendance, son sentiment sur l'interprétation à donner à la règle de droit et sur le sens de la décision à prendre.
Atteignant le grade de président, le magistrat administratif est amené à exercer des fonctions d'encadrement, en se voyant confier la présidence d'une formation de jugement, et de gestion des hommes et des ressources, en accédant à la tête d'une juridiction.
Au titre de ses fonctions administratives
Le magistrat de tribunal administratif et de cour administrative d’appel participe à des commissions administratives et juridictionnelles diverses, le plus souvent placées sous sa présidence : Conseil supérieur de l’audiovisuel, commissions de contrôle des élections, chambres disciplinaires et sections des assurances sociales des professions de santé, jurys de concours…
Les fonctions administratives ainsi exercées lui permettent de diversifier et d’enrichir son métier de magistrat administratif, en l’amenant à exercer ses compétences juridiques en dehors d’un cadre strictement contentieux, au contact des professionnels des secteurs concernés.
Le rayonnement de la juridiction administrative
Les magistrats administratifs sont en outre directement associés à l’action de rayonnement de la juridiction administrative. Ils peuvent, à titre individuel, mener des missions de conseil à des administrations ou à des établissements publics. Ils peuvent également avoir une activité d’enseignement et de publication, et être sollicités dans le cadre d’échanges ou de colloques sur des sujets où ils ont acquis autorité. Ils sont associés aux actions de rayonnement et de coopération internationales que le Conseil d’État développe au niveau de la juridiction administrative dans son ensemble.
Une compétence affirmée et valorisée
Le magistrat administratif acquiert, dans l'exercice de ses fonctions, des compétences juridiques variées. Il peut s'appuyer, à l'entrée dans le corps, sur une formation initiale de six mois, puis, tout au long de sa carrière, sur un programme diversifié de formation continue (y compris dans des domaines tels que la gestion, l'encadrement, la gestion des ressources humaines...). La diversité du contentieux administratif le conduit à maîtriser des dispositifs juridiques complexes, dans des domaines aussi différents que les libertés publiques, le droit économique (marchés et contrats, fiscalité...), le droit de la fonction publique, l'urbanisme et l'aménagement du territoire, le droit des collectivités territoriales... Cette variété n'est pas exclusive d'une certaine spécialisation dans les matières les plus complexes, parfois recherchée, jamais imposée, qui fait des magistrats administratifs des praticiens du droit appréciés.
Le métier de magistrat administratif conduit à cultiver également des qualités plus générales, elles aussi valorisables tant au sein qu’en dehors de la juridiction administrative : goût pour la réflexion, sens de l’analyse et rigueur du raisonnement, capacité de travail et d’organisation, ouverture d’esprit, sens du débat et de la collégialité, autonomie, prise de responsabilité sur chaque dossier traité.
Enfin, le métier de magistrat administratif s’adapte à l’évolution du contentieux. La juridiction administrative s’emploie activement à promouvoir les dispositifs de prévention du contentieux. Mais pour faire face à l’augmentation du nombre de dossiers à traiter, elle développe aussi l’utilisation des nouvelles technologies (outils de recherche experts, téléprocédures…) et, surtout, l’aide à la décision. Afin que les magistrats puissent se concentrer sur le cœur de leurs compétences, la juridiction administrative s’est engagée dans un effort de recrutement important d’assistants juridiques, qui apportent leur appui aux magistrats dans le traitement des dossiers. Les procédures s’adaptent également à la diversification des affaires : pour les plus simples, et dans certaines matières, le juge administratif peut statuer seul ; cette responsabilité est accessible aux magistrats ayant le grade de premier conseiller ou ayant une ancienneté minimale de 2 ans, donc assez rapidement dans la carrière.
Perspective de carrière au sein et en dehors du corps
Des possibilités de carrière évolutive et complète au sein du corps
Dans la première partie de carrière (grades de conseiller et de premier conseiller), le magistrat administratif peut exercer successivement le métier de rapporteur et celui de rapporteur public. Il peut aussi se voir confier la conduite d’audiences de « juge unique », où il est appelé à diriger les débats et à statuer seul. Il faut souligner qu’il peut également alterner des fonctions en juridiction de première instance et en juridiction d’appel.
La juridiction administrative offre ensuite, pour la seconde partie de carrière, en général après une quinzaine d’années dans le corps, l’accès au grade de président. Il confère aux magistrats concernés des responsabilités accrues, tant en termes de participation au processus juridictionnel qu’en termes d’animation et d’encadrement d’équipes de magistrats et d’agents de greffe. Les magistrats souhaitant accéder à une présidence de juridiction peuvent se voir confier la responsabilité administrative et financière de collectifs qui comptent, selon les juridictions, de 20 à près de 200 personnes. Cette carrière, enfin, offre aussi, compte tenu de la carte des juridictions, des possibilités de mobilité géographique, y compris outre-mer, pour ceux qui le souhaitent.
Les perspectives de carrière en dehors du corps
Les compétences cultivées au sein de la juridiction administrative assurent des opportunités de mobilité ou de détachement intéressantes. Les fonctions en détachement se situent notamment :
en administration centrale, souvent des postes de responsabilité juridique, mais pas uniquement, aussi bien dans les administrations « régaliennes » (services du Premier ministre, défense, justice, intérieur, affaires étrangères), que dans les administrations financières, économiques ou sociales (finances, emploi, écologie…) ;
en administration déconcentrée (administration préfectorale), dans les collectivités territoriales (directions générales des services…) ou dans des établissements publics ;
dans les institutions communautaires (référendaires à la CJCE, administrateurs de la Commission européenne…) ou internationales, ou encore dans des postes diplomatiques.
Ces possibilités ont été enrichies grâce au développement d’un appui à la gestion des carrières des magistrats et grâce à l’implication systématique des membres des corps dans les actions de rayonnement et d’échanges internationaux que développe le Conseil d’État.
Les compétences des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ouvrent également une voie d’accès privilégiée au Conseil d’État, par le biais du tour extérieur qui leur est réservé. Ce tour extérieur a été renforcé :
tous les ans, au moins deux membres du corps ayant atteint le grade de premier conseiller sont nommés maître des requêtes au tour extérieur ;
pour chaque période de deux ans, un membre du corps ayant atteint le grade de président est nommé au grade de conseiller d’État en service ordinaire.
Pour connaître les différentes voies d'accès, rendez-vous sur le lien ici